Les Vrtti
Il est difficile pour la pensée collective humaine de saisir de façon unanime et homogène la compréhension et la signification d’un même terme.
Je vais tenter dans cet article de faire au mieux pour que l’idée sous-jacente au terme « Vrtti » vous soit le plus clair possible, entendue et étudiée avec ma compréhension des auteurs et de leurs commentaires relatifs.
Dans son livre intitulé « Au cœur des Yoga-Sutra », BKS Iyengar écrit ceci dans son prologue :
« L’erreur est humaine. La Connaissance est infinie et éternelle, mais les pensées du mental humain demeurent dans le champ du fini ».
Les diverses traductions employées pour définir les mots d’une autre langue (ici en l’occurrence le sanskrit), sont toujours sujettes à des colorations, à nos connaissances et à nos propres filtres de perceptions, autrement dit, à nos interprétations. Elles donnent naissance à une multitude de commentaires. Cette multitude de commentaires peut faire perdre la nature de la pensée première de l’auteur-rice. Toutefois, ce qui est très intéressant par ce foisonnement de traductions, c’est qu’il élargit le champ de compréhension et d’étude du vocabulaire, et donc de la pensée exprimée, pour tout à chacun.
Dans le Yoga-Sutra de Patanjali, le deuxième aphorisme dit ceci :
I.2 « Yogah cittavrtti-nirodah »
Le mot « cittavrtti », dans la traduction et le commentaire fait par Bernard Bouanchaud, est traduit comme étant « les activités du psychisme ».
La traduction complète qu’il fait de cet aphorisme est : « Le yoga est la faculté de diriger les activités du psychisme ».
À titre comparatif, voici la traduction du même aphorisme faite par Marc Ballanfat : « Le yoga est la résorption des opérations du mental »
BKS Iyengar, dans le livre « Au cœur des YS », traduit « cittavrtti » par « les fluctuations du mental », mais en se basant plutôt sur l’expression de « Vyutthana citta » que « cittavrtti ». (cf p.105 de son livre)
Ceci dit, BKS Iyengar traduit le mot « vrtti », un peu plus loin dans son ouvrage, par « ondes de pensées ». (cf p.109)
Les « vrtti » sont dans notre mental comme les nuages dans le ciel, à plus ou moins grande proportion, ils masquent la beauté de l’infini céleste.

Je m’en tiendrai à ces commentaires-ci pour ne pas trop encombrer la compréhension de ce terme mais sachez que vous pourrez probablement trouver encore d’autres regards et donc d’autres traductions, qui peut-être vous seront plus explicites.
« Ces ondes de pensées (en faisant donc référence aux vrtti), tôt ou tard, vont peu à peu créer des déséquilibres dans nos facultés psychologiques et mentales, générant des perturbations. Cependant, elles peuvent aussi être utilisées pour créer un équilibre mental positif et assurer une stabilité du mental et de son contenu » (cf p.110)
Dans son essence, la pratique du yoga est une méthode développée il y a bien longtemps et qui vise essentiellement à stabiliser et équilibrer nos « humeurs » du mental, et ainsi ressentir et découvrir la profondeur de notre être, et se relier à soi. Elle a été développée et expérimentée dans une période et un cadre très spécifique mais reste complètement d’actualité et continue de contribuer au mieux-être de l’être humain. L’élément important dans la pratique du yoga, c’est de retrouver notre capacité à nous reconnecter à nous-mêmes, en soi, dans un état calme et tranquille. Je traite de ce sujet car il me semble qu’on a toutes et tous ce petit hamster qui courre parfois plus ou moins vite dans la tête….. et apparemment, ce n’est pas quelque chose de récent !
Yoga est une méthode d’auto-appropriation de la gestion de notre état de santé qui demande une certaine implication et beaucoup de pratique pour développer nos facultés à gérer notre état d’équilibre le plus favorablement possible, physiquement, émotionnellement et mentalement.
Voici une citation de Sadhguru, maître yogi contemporain : « Le problème n’est pas avec la Vie. Le problème est que nous n’avons pas pris en charge notre mental ».
Je trouve cela très pertinent et plutôt juste car nous ne sommes pas éduqués en ce sens : notre mental prend souvent le dessus et dirige discrètement nos vies alors qu’il n’est qu’un de nos outils, une faculté de l’être humain. Je n’ai moi-même pas appris à gérer les fluctuations du mental étant jeune et je me suis crée énormément de stress. Aujourd’hui encore je m’exerce à améliorer cette capacité de gestion du mental (je crois d’ailleurs qu’il s’agit d’un exercice de tous les jours). Cette compréhension que le yoga a su développer très tôt m’apporte des moyens et des techniques pour apprendre à me réapproprier cette faculté de pouvoir stabiliser les fluctuations du mental.
Bouddhistes et Taoïstes utilisent une métaphore assez rigolote pour désigner notre mental qui passe d’une pensée à l’autre comme un petit singe sauterait d’une branche à l’autre.
En Occident, nous avons aussi su développer aujourd’hui une pléiade de techniques pour aider l’Homme contemporain, submergé par ses rythmes de vie, pour palier à nos « humeurs » psychologiques et mentales, sans pour autant installer dans son quotidien un cheminement de yoga.
Toutefois, ce que j’apprécie personnellement dans ce cheminement sur la voie du yoga, c’est toute l’ouverture qu’elle engendre peu à peu de notre relation avec toutes les formes de vie. Il s’opère en nous comme une transformation qui peut ouvrir tout notre Être à la perception d’une autre dimension, plus subtile et plus raffinée, que je nomme l’invisible chemin, un regard nouveau sur la Vie car le yoga inclut la compréhension globale de tous les mouvements de vie….ceci dit, une personne peut tout à fait être sensible à cette autre dimension plus subtile et plus raffinée sans pour autant cheminer sur la voie du yoga. Nos sensibilités et nos activités mentales sont somme toutes elles aussi relatives à chaque personne.




